DIFFICILE QUESTION DE LA BEAUTE... | ||
Après lecture de Pascal Quignard... " Vie secrète " | ||
Notre premier amour n'est que le deuxième. Il en fallut un autre quelque part au commencement de notre vie et même avant que nous soyions nés, pour que nos yeux, notre odorat et nos oreilles s'y retrouvent. Nous sommes donc formatés par des vies antérieures qui étaient à d'autres, et la singularité de notre venue au monde contre laquelle nous ne pouvons rien. Nous appelons "Beauté" quelque chose qui met nos sens et nos organes dans les conditions de leurs impressions premières, celles où nous ne pouvions distinguer le plaisir de la terreur, où sans angoisse l'infini et l'inconnu étaient forcément à notre porte... Il s'est passé depuis bien des choses et lorsque nous balayons devant chez nous, c'est de pousières, feuilles mortes et mouches crevées qu'il s'agit. Mais parfois un rayon de lumière sous un certain angle donne l'illusion du neuf, d'un retour au temps où les mots ne servirent à rien. | ||
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Ducruet.©.06-2005. |
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Les roses ont inspiré les petits et les grands poètes. Elles font encore la fortune des fleuristes et des dragueurs. Je n'ai connu personne qui leur manquait de respect. Elles ont l'air de nous ouvrir les portes du paradis et nous pensons à elles quand on nous parle de beauté. Il est instructif de se rappeler qu'une fleur n'est qu'un organe reproducteur : lorsque nous l'admirons, profitons de ses parfums et l'installons sur une table, nous rendons hommage au sexe... ayant coupé court au langage. Offrir des fleurs dispense de longs discours et raccourcit les délais. | ||
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Ducruet.©.06-2005. |
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La Beauté ne devrait pas être mêlée aux épouvantables dissertations de bacheliers. Elle ne s'enseigne pas en trois parties. Ne devraient en parler que les amoureux et devraient se taire les professeurs qui sont à la connaissance ce que le code de la route est au voyage... Le Paradis n'est de ce monde que parce que nous y avons laissé des plumes, que nous l'avons fui en hurlant, que nous hurlons encore si le plaisir nous tient et qu'une dernière fois notre dernier bol d'air sortira en hurlant de notre dernière chambre... La Beauté est dans l'image qui peut-être musique ou parfum, couleurs ou formes... L'image est dans notre tête, bien à l'abri des lampions, comme les mots recouverts par le renversement de l'encrier... C'est un jadis qui parfois se glisse au présent, comme si nous avions ailleurs un autre corps où aller... Nous ne verrons jamais notre conception ni notre mort et la Beauté ne fait qu'un signe: elle nous rappelle que nous avons deux mondes sur les épaules, le vivant et le mort... que tout nous arrive en bloc dans la tête et qu'il faut savoir perdre la vie pour en savoir plus... | ||
Ducruet.©.06-2005. |
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