On dirait dans la vitrine que la fiction se rapproche de la réalité. Ces créatures ne sont pas celles de Dieu mais y ressemblent. Perfection des anatomies, perfection de la peau, lissage. Elles n'ont évidemment pas d'histoire, parce que si on a une histoire on a vécu des épisodes plus ou moins supportables, on s'est adapté dedans comme dehors, des marques se sont imprimées sur les visages, les corps ont encaissé quelque chose. Ici on n'a souffert de rien, pas même des amputations de bras et de jambes. "Ils sont un peu trop Aryens" disait le directeur du magasin... Le mot juste serait plutôt qu'ils sont d'un monde qui rêve de naître, qu'ils attendent indéfiniment les objets de leurs désirs et que leurs désirs n'ont pas de sexe. Ce sont les petits anges du business... Si loin, si beaux, gentils, propres et en pleine santé qu'on ne sait plus s'ils manquent de blousons ou de cervelle. Mais on est sûr qu'ils ne sont pas méchants... | |||
Cette enfance les yeux ouverts sur le vide, la tête remplie de courants
d'air, si dénuée du moindre secret, si débarrassée
d'émotion , n'en finit pas de durer, protégée des
fureurs de l'amour et de la mort. Si nous étions immortels et assexués
nous ne pourrions même pas nous regarder les uns les autres car
il n'y aurait jamais rien à voir qui ne fût déjà
vu. Ces mannequins sont à leur manière des oeuvres d'art.
Ils donnent une image de ce que serait le monde des hommes sans les hommes... |
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