PETITS MATINS ...
 
 
 
soleil de septembre.Verneusses. photo michel ducruet ..Lever du jour. La croix blanche.verneusses. photo michel ducruet.. La croix blanche. Sapin au lever du jour. photo michel ducruet
Ducruet. ©.2009.Verneusses.
 

..................................... Pour les vaches, pas grand chose à dire entre la naissance et l'abattoir. Savent-elles attendre ? Font-elles semblant ? Il semble qu'elles ne sont pas si tranquilles , que l'existence qui leur est faite dérange quelques coins secrets de leur horloge interne... Une bête meurt ou vit à 100%. Si on la ralentit dans la mort ou la vie, c'est qu'il se passe quelque chose d'anormal, une contrainte fatale, une déviation de son élan vers la floraison de soi-même... Bien que leurs cervelles soient incapables de conscience, elles ne sont pas exemptes de pressentiments, d'une vague sensation d'inquiétude au regard des précautions dont les hommes les entourent. Cette nourriture qui se déplace sous leurs yeux, cette eau qui possède un petit goût de chlore, ces chiens et ces bâtons, ces étiquettages sur les oreilles, ces types en blouse blanche qui leur plongent je ne sais quoi dans la vulve... La montée dans les bétaillères sous les injures, les sabots qui glissent , les cornes qui tapent sur les ridelles, les nuages qui défilent à toute vitesse, La descente sur le goudron , les barrières en métal, les cris , la presse, les refoulements dans des couloirs , la vision dernière d'une porte de fer, une secousse qui paralyse... la lumière intense, les crochets, l'eau bouillante, la suspension par les pattes arrière, le bruit des tronçonneuses, le sang qui ondule vers les bondes, la découpe, le déversement des boyaux, la merde débarquée, les foies séparés, les coeurs détachés, les reins sortis, les mains gantées de caoutchouc qui détaillent la coupe, au-dessus de ces mains les yeux des hommes déguisés, blousés, coiffés de plastique qui pensent gonzesse , moto-cross et loto, écoeurés par l'air fumant des viandes, des tripes, et des maïs non digérés... Dehors sont les crédits, les téléphones portables, les clochers avec un poulet planté sous la girouette, le pastis des glaçons, la maison de la presse où la messe est dite, le bureau de clopes et de tacotac, les tronches de profs, les ados renifleurs, les rescapés du troisième âge, les boutiques de fringues, les innombrables banques et les non moins innombrables cabinets d'assurances...

..................................... M'étant réveillé 23360 fois lors de 64 virées autour du Soleil, j'ignore si mes aventures méritent réflexion. Les matins du monde renseignent peu sur la position des astres et les étoiles grillent de l'hydrogène inattentives aux âmes. Je n'ai rien vu de clair en ouvrant les yeux la première fois. En dépit de toutes les lunettes que j'ai portées, je ne vois pas mieux quand je me lève, il me faut du temps pour me déguiser en humain, rejoindre la troupe des actifs, heureux comme des somnambules sur la grille d'un balcon du douzième étage.

 
petit matin. photo michel ducruet
Ducruet. ©.2009.Verneusses.
 
 
 
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