Les maternelles..... | ||
Ducruet.©.2004.
Ombres. |
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Les
langues passent des siècles en compagnie des hommes. Elles naissent
d'une suite de hasards ou d'opportunités. Elles obéissent
aux forts et font obéir les faibles. Esope fut le premier à
dire qu'elles étaient les meilleures et les pires des choses. Avant
lui, les scribes d'Egypte surent que la science de l'écriture nourrissait
mieux le corps et l'esprit que les autres. Les mots se prononcent ou se
gravent. Nous en capturions très jeunes, pour attirer l'attention,
nous faire aimer. Nous en inventions parfois, mais c'est à l'école
que nous tombions dans les dictionnaires et les grammaires. Je suis passé
du français au latin et du latin au grec. Nous n'avions pas le
temps d'avoir un avis sur grand chose, les apprentissages étaient
intenses et prolongés. Vers quatorze ans les meilleurs passaient
sans problème à l'ancien français et au luxe de versifier
leurs thèmes grecs et latins. Cet artisanat de la langue préparait
à l'écriture et à certaines subtilités dans
l'art de connaître ses adversaires, puisqu'une virgule faisait passer
du faible au fort... |
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Ducruet.©.1984.
Bric-à-brac. |
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J'ai
donc appris le français comme j'aurais fait de l'escrime ou de
l'équitation, en reprenant mille fois les choses. Nos maîtres
ne firent jamais semblant de nous laisser penser. Ils ne prenaient pas
l'air pénétré des bons à rien qui demandent
à leurs élèves s'ils sont pour ou contre la peine
de mort, sans vérifier qu'ils font la différence entre rien
et quelque chose... ils nous poussaient dans les textes et les oeuvres
en partant du principe que les larves n'ont qu'à se nourrir en
attendant les métamorphoses... Ils ne s'occupaient pas de savoir
qui nous serions, ils savaient que toute vérité n'est pas
bonne à dire et que les plus adroits sont précisément
ceux qui savent se taire... que les bons écrivains raturent. |
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Ducruet.©.2003.
Simulacre. |
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Je connais des bacheliers qui ne savent pas lire et des rappeurs qui savent écrire. Le Français tombe des mains du consommateur, les textes d'énarques ne pèsent pas dix lignes de Condorcet, les savants se vendent en anglais, les sabirs passent en "prime" à la télé ... Dans un appartement de la petite couronne, buffet henri II, plateaux de cuivre et tapis "clignancourt", Negro du Cameroun et Rachid de Sarcelles répètent en alexandrins... "Si j'suis tombé par terre, c'est la faute à Voltaire...", Souah fait les gâteaux, Polo règle la sono. |
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