Le Grand Pan ...

LE GRAND PAN...



Ducruet.2004.©.

	Le monde ancien n'est pas enterré, ses gravats traînent un peu partout et ses restes servent encore. Les vaches ont été sacrées, peu d'hommes le furent et nous devrions remercier les illuminés qui retrouvaient dans les bêtes les équations de l'univers. Ce fut le propre de l'art de mettre dans les choses les forces divines et le poids de la Terre. Pygmalion polit un marbre qui bouge... Les jardineries de la société de consommation regorgent de statues : les amours et les chérubins promènent dans le ciment une tristesse de mausolées antiques...


Ducruet.2003.©.

	.........................Ces cortèges de faux surprennent comme les gorilles et les chimpanzés de la planète des singes... Mais les enfants qui passent n'auront qu'une seule fois marché près des statues à visage humain, tourné autour d'une pierre dont la magie pourrait faire un compagnon de voyage... Il fut un temps où nous étions le centre de tout. Dans la ville éternelle comme plus tard, les statues disaient que la clé de tous les mystères et de tous les savoirs était là... Que la mesure de toutes les choses était la mesure de l'homme... Que notre confiance en nous valait toutes les prières ... Oppenheimer, les SS, les sorciers de l'économie et les apprentis sorciers du bonheur nous ont foutus en l'air. Nous flottons entre l'amnésie et l'inquiétude sur d'autres mers que celle de la Tranquillité... Il nous reste quelques vieilles lunes pour nos insomnies, et nous posons dans nos jardins ou sur nos fenêtres les signes grossiers d'un improbable retour de l'homme... Nous produisons de l'angoisse pour produire de la consommation qui produira de la pénurie qui produira de la croissance qui produira du capital produisant de l'angoisse... Les riches vont chez les antiquaires, les parvenus s'achètent des ascendants aux cadres dorés. Dans les brocantes industrielles il ya toujours le coin des petits bonheurs, des divinités, des lions de pierre et des amours jouant de la flûte... Le Grand Pan se cache dans les banlieues... Seuls ont disparu l'abondance et le sommeil...


Ducruet.2003.©.


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