DES POIRES EN PARTICULIER... Réponse au courrier du 24/10
     
     
trois poires. verneusses. photo lichel ducruettrois poires. verneusses. photo lichel ducruet
 
Poires. Ducruet. ©. 2004.
 
     
 

...................................Cher monsieur vous me demandez pourquoi "L'étrange livre des poires" ressemble à ce qu'il est : une loterie...

.................................. J'avais des poires sous la main et je m'en suis servi pour faire des natures-mortes comme j'en faisais avec les bouteilles, les chiffons et n'importe quoi. Je n'avais pas de programme et personne ne m'avait rien demandé. Cette gratuité fut payante le jour où je m'aperçus que je ne traitais pas ces poires comme des objets mais comme des personnes... Le mot, en français, a plusieurs sens. Dans le langage courant une poire est le pigeon d'une affaire... le dindon d'une farce... la victime d'un escroc.

..................................Les choses commençaient à pencher d'un côté... Je tirai quelques centaines d'épreuves qui pouvaient constituer une douzaine de familles... suggérer une société, la face cachée d'un monde parallèle... Je n'avais rien écrit, je n'imaginais pas que je puisse le faire. Pendant trois ans les photos sont restées sur la table d'un écrivain, jusqu'au jour où je compris que ces images ne répondraient qu'à moi. La question du livre papier ne se posait pas. C'était cher, peu adaptable. Les mots-clés font entrer les visiteurs pour des raisons plus fortuites qu'un nom derrière une vitrine, il suffit d'une souris au lieu d'une carte visa. En changeant de medium ce prototype de "livre" voyageait ouvert...

..................................En m'occupant de poires je réglais de vieux comptes. Mon père a laissé ses illusions dans la culture de ses poiriers. Il y perdit le sourire. J'avais une revanche à prendre du côté de l'imaginaire, parce que d'une certaine façon j'ai payé à la place des poires et qu'il fallait leur faire un sort. C'est ce fond de tiroir qui m'a poussé dans ce travail. Mais la psychanalyse n'explique pas tout, il fallait des histoires donc de l'écriture. Je me suis longtemps empêché d'écrire parce que j'avais fait de bonnes études or vous savez qu'il n'y a rien de mieux que les professeurs de lettres pour lier les mains. C'est grâce à Jude Stéfan que je suis allé au charbon. Il sait donner du courage et avertir... " Vous devriez écrire...". Ce n'est pas très long une page internet, quinze ou vingt lignes de textes, deux ou trois photos pour placer quelque chose de senti. Il y avait enfin l'idée que les photographies sont aussi des autoportraits mais qu'une seule photo ment plusieurs fois. On ne peut empêcher personne de se raconter des histoires devant votre image. J'ai réglé trois fois cette question de l'autoportrait. Puisqu'il est inévitable, autant faire de l'espace : dans "l'album de famille" on ne voit que mon entourage débarrassé des " jours meilleurs" et très occupé à me voir. Dans "le voyage sur l'île de B..." la fiction se débarrasse du photographe. Figurez-vous qu'un bon éditeur parisien m'a cru anthropologue, il voulait publier sur une revue scientifique...

Avec les poires je pouvais dire deux mots de la condition humaine sans me présenter... L'astuce dans les trois livres consiste à ne mettre que soi mais intouchable comme les hologrammes... L'idée de la loterie n'est pas littéraire, elle arrive à cause de l'ordinateur... la fin de Gutenberg, le débarquement du zapping.

 
     
poire. extrait livre des poires. photo michel ducruet.vieille poire. extrait livre des poires. photo michel ducruet
 
L'ETRANGE LIVRE DES POIRES
 
     
     
     
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