L'AVENIR DES TOMATES ... (7) | ||
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Ducruet.2008.© |
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" La suite est de plus en plus incroyable. Ils ont été entourés par un poison qui tuait tout ce qui s'était écarté de quatre ou cinq jours de pirogue. Ils ont échappé à un processus mortel de grande envergure, les courants et les vents les ont protégés contre toute attente ... Notre île a été sauvée par ce vortex de hautes pressions qui a duré au moins le temps de quelques générations. C'est pour cela que nous avons toujours un ciel bleu. Les cahiers disent encore que seuls mouraient les équipages, qu'ils ont vu des chiens et des chats revenir au milieu des cadavres, que les coquillages incrustés sur les coques n'avaient pas souffert... François se tut un moment... Je suis sûr que cette destruction a été réalisée par des êtres intelligents ... Ce n'était pas naturel... " Ils avançaient, ils suivaient les signes sans difficulté car une sorte de bon sens les conduisait au bon endroit chaque fois qu'ils s'arrêtaient. Un jour qu'ils avaient emprunté une vallée curieusement plate, couverte de végétation claire, ils butèrent sur des rochers étranges... Il y avait des recoins aux formes géométriques et des trous réguliers de place en place et de même calibre. Ali fit observer que ces formes correspondaient à certaines descriptions des cahiers, que d'après les textes il y aurait bientôt des rochers énormes et à un certain endroit un rectangle de fer haut comme une maison. Ils cherchèrent une heure ou deux mais ne virent rien de semblable. David avertit que s'il y avait du métal en grosse quantité, la lumière de son collier passerait au vert. A partir de là, ils passèrent la nuit dans les arbres sur des hamacs de voyage, en veillant à laisser un peu plus loin des fils tendus munis de clochettes. Ils ne se sentaient ni surveillés ni suivis, mais ils mettaient les pieds sur un territoire de plus en plus étranger. Peu à peu, des reliefs incongrus accidentaient les paysages, comme les traces d'un monde funèbre aux détails enfouis sous les cendres, la poussière, les tapis herbeux, les branchages trop pittoresques... Parfois pointaient des moignons d'acier, des pans de béton aux ferrailles nues...Des courbes trop régulières bordaient les vallées, par endroits les reliefs s'enchevêtraient en masses immenses et il fallait serpenter entre des chaos sur des sentiers qui se coupaient à angles droits... Vers le troisième mois de cette randonnée, un matin comme les autres, David ressentit des grésillements différents sur son collier de métal, la diode bleue clignotait plus vite que d'habitude... Les deux autres ne firent aucun commentaire. Vers midi après avoir consommé des pommes ramassées en route, ils se regardèrent puis David fit un signe et sortit de son sac un cahier en mauvais état. "Il me semble que nous sommes très près de l'Homme de fer, une journée ou deux nous séparent du terminus." Il ouvrit presque à la dernière page:" ...Et ce jour nous avons eu de l'orage plusieurs heures, la foudre tombait près de nous, on entendait alors comme des bruits d'essaims, puis des frémissements curieux et alors l'éclair faisait exploser les branches avec de la fumée... Nnous nous jetions à terre, débarrassés de nos objets métalliques, nous sentions des décharges et par miracle personne n'était brûlé... Cela dura quatre ou cinq heures de suite, le ciel était noir, il y avait des vents mauvais, l'eau tombait à verses, les ruisseaux nous passaient dessus... Puis il y eut rayon de lumière, les nuages filaient à toute vitesse, le calme revint, nous nous sommes relevés, nous avons récupéré nos armes et nous n'avions pas repris notre route depuis une heure que nous sommes arrivés dans une large clairière bordée de ruines où s'agitaient des oiseaux. Nous nous sommes avancés en direction d'un gros rocher à contre-jour... L'éclaireur fit signe de se taire... Il montra un bouquetin qui se détachait sur la roche ... Nous avons pris nos flèches et nous sommes approchés sans bruit... Pour être face au vent, nous nous sommes déportés du côté où nous avions le soleil dans le dos... Le rocher devenait plus visible, quelqu'un poussa un juron... Notre gibier s'enfuit instantanément et nous fûmes cloués sur place... Ce rocher n'était qu'un immense personnage de pierre et de rouille... Nous vîmes qu'il s'agissait d'un homme couché sur le dos... D'une de ses épaules un morceau de bras se dressait au ciel... Il était recouvert de lierre mais laissait voir de curieux vêtements près de son cou, il avait le nez droit, le front incliné, les sourcils froncés, une espèce de moustache étroite au milieu de la lèvre supérieure, le menton proéminent, une sorte de mèche lui barrait le visage et cette tête fixait le ciel avec un air de rage et de haine comme nous n'en avions jamais vu... Les jambes se terminaient par des bottes... A certains endroits on pouvait voir le détail des coutures taillé dans la pierre... Cet homme devait mesurer dans les 20 mètres. La statue était brisée en sept ou huit morceaux. Le bras qui manquait s'allongeait sur le côté prolongé par une main aux doigts collés les uns aux autres et large d'un mètre cinquante... Au bout de cette statue s'élevait un piédestal, des traces d'inscriptions en occupaient la partie la moins rongée par le temps, aux quatre coins des croix bizarres en forme d'ailes de moulin fixées par des clous de métal... Il n'y avait plus aucun doute, nous marchions sur les restes d'un monde ravagé par une catastrophe ..." François fit un signe en direction du Nord ... " On y va!" |
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