NARCISSE... | ||
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Ducruet.©.
1996-2008 |
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On vit davantage si on ne se connaît pas. Comme un oiseau migrateur qui ne sait rien de la géographie. Etre corbeau ou renard n'a plus d'importance quand il n'y a plus de fables. Nous sommes des créatures différentes, coincées entre l'alpha de la boue et l'omega de l'esprit... Cette position ne fait pas que nous sommes des anges mais elle nous autorise à faire les clowns autour du Soleil. On dirait que tous les crayons de tous les dessins de la création se sont donné rendez-vous dans nos cervelles, que nous sommes des hologrammes qui varient quand bouge la lumière. Entre la nuit des rêves et le jour des réalités, nous n'avons jamais choisi. Puisqu'il faut vivre, nous prenons au sérieux tout ce que nous avons sous le nombril et nous nous dépensons sans compter. Casser des pierres et faire des trous, traverser les rivières, escalader les montagnes, tuer des bêtes et ramasser des charognes... Ce fut notre emploi du temps, rythmé par les alternances de ventres vides et de ventres pleins. Nous en sommes toujours là, même sous la forme savante des sociétés modernes: la production de Cheese-burgers et des excréments qui les suivent rejette plus de CO2 et de méthane dans l'atmosphère que le parc automobile des Etats-Unis... Cette fièvre matérielle brouille tellement la vue que du bas en haut de l'échelle sociale on n'a les pieds sur Terre que pour pêcher en eaux troubles... La mer n'est au fond qu'une réserve de poissons crus et les hommes ressemblent à des tuyaux qui les engloutissent d'un côté et les vidangent de l'autre... Mais, comble de l'horreur, nous sommes des tuyaux qui pensent. Personne ne s'arrête de penser, dormir ne suffit même pas. Dans nos têtes, il en passe et de toutes les couleurs... Nos grossièretés nous écoeurent et puisqu'il faut mettre du piment et du sel dans nos vies, nous mettons des mots et nous dessinons des images sur tout ce que nous trouvons. Cette haine de notre roman n'est pas facile à contenir. Il faut des talents pour écrire et peindre, mais une longue patience peut suffire... L'extrême difficulté consiste à ouvrir un oeil sur les égoûts et l'autre sur les rêves... Car trop rêver tue le temps et l'amitié... C'est un faux exil, aussi étrange que de chercher la liberté en prison... Quels illusionistes croiraient sortir des lapins d'un chapeau? ... | ||