L'AVENIR DES TOMATES ... (5)
   
bateaux, ships, papiers de couleur.photo michel ducruet 2008
bateaux, ships, papiers de couleur.photo michel ducruet 2008
Ducruet.2008.©
Ducruet.2008.©
 

"François, nous ne nous sommes pas trompés. Je ne connais pas ces paysages mais nous avons suivi les bonnes étoiles. " Celui qui parlait devait avoir dans les trente ans, portait à l'oreille une boucle d'or. Il avait au cou une espèce de collier d'où partaient quelques grésillements et des petits flashes de lumière bleue. Devant lui, son compagnon fit un signe bref. Les trois explorateurs changèrent d'allure. Ils revinrent à leur embarcation.

Cette pirogue, qui de loin semblait primitive, était en réalité très bien construite. Large de deux mètres et longue d'une quinzaine, elle était pontée de planches régulières, avait deux écoutilles robustes fermées par des taquets en métal. Son mât tenu par des chevilles épaisses, ne dépassait pas les six mètres et deux balanciers à hauteur de flottaison donnaient une impression de robustesse à la coque relevée aux extrémités. Une membrure renforçait la proue. La poupe formait un début de spirale qui se prolongeait à babord et tribord par une moulure épaisse formant une sorte de bastingage. La voile écrue, ourlée d'oeillets, avait été repliée sur le pont. Le troisième homme se saisit de quelques sacs, les passant aux deux autres puis il s'assura soigneusement du mouillage. Il tendit une corde et ils amarrèrent l'embarcation à l'arbre le plus proche après avoir jeté à l'eau une sorte d'ancre à trois branches.

Ils ajustèrent les sacs sur leur dos et se passèrent une gourde où chacun but quelques gorgées. "Messieurs, je suis de votre avis, c'est bien d'ici que nous devons partir." L'homme reprit:" Tout correspond à la légende, les trois petites montagnes du fond, les deux iles avec les rochers blancs... Je ne connais pas les noms de ces plantes, mais elles ressemblent aux dessins que votre grand-père, mon cher Ali, avait trouvé dans une grotte de l'Ile des phoques. " Ali eut un léger sourire, lui revinrent en marchant des images de son enfance, de cet arrière grand-père qui cinq fois par jour, se tournait vers l'Est, sans trop savoir pourquoi, prononçait quelques mots incompréhensibles, parfois se prosternait, se relevait les mains ouvertes et disait en riant que c'était un truc contre le mal de dos... " Vous savez, David, mon grand-père a emporté trop de secrets avec lui." L'autre se retourna : " Il était comme tous les gens de cet âge, ils avaient des larmes aux yeux sans raison, ils se taisaient sans motif, ils cachaient des choses, oui.... ils cachaient des foules de choses..." " C'est vrai, c'est vrai ... François penchait la tête au-dessus de ses pieds... Je me rappelle que ma grand-mère n'aimait pas retourner chez ses parents, qu'elle ne supportait plus les cauchemars et le bruit qu'ils faisaient la nuit, les jurons qu'ils lâchaient dès qu'elle posait des questions sur le passé." Il faisait beau. Ils avaient progressé sans peine dans une végétation de pins et de chênes verts, tapissée d'herbes de type méditerranéen. Des vignes sauvages pendaient aux branches et de temps à autre ils croisaient un olivier. L'air léger sentait la lavande, il y avait du thym partout et des bruyères. Les cigales faisaient un vacarme infernal, des papillons volaient de haut en bas, toutes sortes d'oiseaux remuaient. "Je ne vois pas de traces" dit François qui marchait en tête à l'affut de quelques passages de quadrupèdes. Ils poursuivirent tout l'après-midi jusqu'au bord d'un canyon, descendirent en rappel une falaise abrupte et posèrent les pieds sur les rives d'une ruisseau tranquille. De temps en temps s'ouvraient dans le rocher de larges cuvettes profondes de deux à trois mètres et remplies d'une eau si pure qu'on distinguait chaque grain de sable du fond et l'oeil brillant de dizaines de petits poissons à la robe tigrée. Ils passèrent la nuit sur un replat de la roche et repartirent assez tard, après avoir attendu le soleil. Le canyon s'étirait sur quelques kilomètres et s'ouvrait sur une large clairière qui remontait en pente douce vers le nord. Ils grimpaient sur le plateau quand Ali se pencha vers la droite, fit un signe et s'approcha d'un rocher couvert de mousse. Il y avait de curieuses petites fleurs, ouvertes comme des yeux, bordées de cils qui se terminaient par une boule transparente. L'une d'elles s'était repliée sur elle-même en serrant un moucheron. Ils restèrent un moment devant ce spectacle puis se remirent en route lorsque François revint sur ses pas, repoussant les fleurs sur le côté: " Vous devriez venir !" Ils se turent et se penchèrent à nouveau.

[<---- ] La pointe à gauche suivie de quatre traits réguliers, C'était bien un signe tracé pour être vu. Il montrait le Nord.

 
bateaux, ships, papiers de couleur. verneusses.photo michel ducruet 2008
bateaux, ships, papiers de couleur.photo michel ducruet 2008
Ducruet.2008.©
Ducruet.2008.©
   
   
   
   
   
Livre "FAMILY GAMES" Parution Bruxelles, Le Caillou Bleu, Diane Ducruet :" FAMILY GAMES "  
   
   
   
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